Ces hommes infatigables qui sont toujours là, tout le temps, à chaque coin d’étagères.
Magnus Karlsson est clairement de cette trempe, multipliant les projets avec une ligne de conduite presque à chaque fois vérifiable : être le capitaine et seul maitre à bord. Mis à part dans
Primal Fear où il partage logiquement le commandement avec Matt
Sinner, il faut dire qu’entre ses albums de duo (Allen / Lande, Allen / Olzon, Kiske / Sommerville),
Free Fall ou The FerryMen (et je passe tout ce qui n’a pas été déterré ces dernières années), le suédois est constamment compositeur, parolier et donnant le cap à l’ensemble.
C’est aujourd’hui avec
Heart Healer que le voilà de retour, un projet qu’on imagine ambitieux car l’homme a voulu se frotter à un nouveau terrain de jeu. Intitulé "The
Metal Opera", nom ronflant éculé depuis que Tobias Sammet a créé
Avantasia, il est ni plus ni moins qu’un nouveau concept avec une armada de vocalistes connus comme cela s’est répandu depuis vingt ans. La petite particularité cette fois-ci est de n’avoir recours qu’à des chanteuses, pas forcément les plus connues mais celle ayant le vent en poupe en ce moment.
Magnus qualifie son projet de « dramatique et épique, et de loin celui lui ayant demandé le plus d’efforts de toute sa carrière. C’est quelque chose sans aucune limite ni règle ». Lorsque l’on connait le bonhomme, on sait déjà que même s’il n’y a pas de règles, son esprit est tellement conditionné par son style depuis des années que la surprise ne sera majoritairement que par l’intervention d’une emphase plus lyrique et symphonique qu’avant.
Qu’est-ce que je gagne ?
Sans renier à aucun moment la qualité du travail et d’arrangements de ce premier opus, il est audible à chaque instant le style très power tradi du suédois, sur lequel une nappe de claviers orchestraux est venu s’ajouter, rendant les compositions un peu plus longues (dans le genre des compos plus progressives de
Primal Fear finalement).
Personnage principale, Adrienne Cowan (
Seven Spires, Masters of
Ceremony) se taille la part du lion avec six morceaux, bien aidé par
Anette Olzon, Noora Louhimo (
Battle Beast), Ailyn (ex-
Sirenia, Her
Chariot Awaits) ou encore Margarito Monet (Edge of
Paradise). Un joli casting même si pas forcément le gratin de la catégorie. "
Awake" débute dans une ambiance très symphonique avant que le premier riff n’intervienne en terrain connu. Le personnage principal se réveille, découvre ses pouvoirs de guérison auprès des autres et rencontrera des individus aux desseins plus ou moins positifs. Rien de neuf côté scénario, si ce n’est la possibilité d’intégrer des dualités vocales et des personnages plus dark. On regrettera d’ailleurs que
Magnus n’ait pas utilisé les capacités extrêmes d’Adrienne, elle qui s’épanouit également très bien dans ce registre.
Chaque composition ou presque débute sur une intro au piano ou symphonique avant de réellement commencer et, dès la moitié de l’album, une sorte de routine s’installe, d’autant plus que rarement
Magnus avait été aussi mélodique sur un album, voir même carrément mollasson (comme si de travailler avec uniquement des chanteuses l’avait empêché de parfois montrer les crocs). "Who Can Stand All Alone" offre un beau duo entre Adrienne et Anette, les deux évoluant dans un registre finalement assez proche, et on commence déjà à se dire que les différentes personnalités ne seront pas si bien tissées que cela, puisqu’il est parfois difficile de réellement différencier les chanteuses les unes des autres. "Come
Out of the Shadows" (un riff qui aurait tellement mérité plus de mordant) propose trois chanteuses mais on peine parfois à réellement distinguer qui est qui puisque le suédois a choisi des femmes aux timbres globalement trop proches les uns des autres. Cette uniformisation dessert totalement le concept même de ce genre d’albums où Tobias Sammet et
Arjen Lucassen (pour ne citer que les deux maitres du genre) ont au fil des années créés des sagas en grande partie grâce à la personnification de ses invités.
"Into the Unknown", s’ouvrant sur de très beaux chœurs, permet par exemple à Noora (malheureusement seule sur le titre) de montrer son registre plus rugueux même si c’est bien moins agressif que ce qu’elle fait avec son groupe. En se bornant à rester dans un registre très mélodico-symphonique,
Heart Healer perd totalement sa force de frappe et la seconde moitié de l’album ne réserve plus ni surprise ni réel intérêt. Il y aurait bien "
Evil’s Around the Corner" avec certains accents plus dramatiques mais le problème vient aussi et surtout de la faiblesse des riffs, totalement passe-partout, comme si le compositeur s’était tellement focalisé sur les arrangements et les claviers qu’il en avait oublié la base des structures et la force des guitares, ici vampirisées d’une quelconque force. "
Mesmerized" frôle même la pop mais pas spécialement dans le bon sens tant le tout manque d’énergie. "This is Not the
End" vient clôturer le concept avec la désormais classique participation de chaque chanteuses (même la tracklist est classique, là où Tobias essaie de revoir sa chronologie dernièrement pour créer un effet de surprise). Loin d’un final en apothéose, avec de multiples chœurs ou des chants en canon, la composition se termine plutôt sur un refrain assez facile chanté par toutes en même temps, certaines noyées malheureusement dans le mix. On retiendra en revanche l’un des rares solo de l’album vraiment marquant où on retrouve réellement la patte du suédois.
Heart Healer avec son "The
Metal Opera" ne surprend donc personne et vient s’ajouter à la liste longue comme le bras des projets d’un homme boulimique de travail mais ayant besoin d’une indispensable prise de recul sur sa création. Car à force d’empiler les groupes, il en retire la force de chacun, se perd en concept et se disperse inutilement, cherchant à épuiser certains filons là où ils pourraient être intéressant de regrouper ses inspirations autour d’un seul et même groupe. Ambitieux probablement mais inintéressant surement, ce nouvel album risque de ne jamais trouver un public déjà abreuvé de projets de ce genre et probablement devenu très difficile en la matière ; l’effet de surprise ne prenant plus. Même les inconditionnels du genre (dont moi) n’y trouveront pas un intérêt plus grand que les dernières créations de
Timo Tolkki, dont les points communs sont malheureusement trop nombreux. Copie à revoir sous peine de succomber à l’impatience des fans ...
Toujours pareil, c est bien produit, ça joue bien.....mais pas beaucoup d inspiration ....du déjà entendu....
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