Il y a encore un an, le discours officiel de
Kiss depuis 2001 était qu’il n’y aurait plus de nouvel album, préférant au Hold-Up du téléchargement, continuer sa carrière sur ses acquis et son très riche capital de tubes et de standards éternels, lui permettant de remplir des stades entiers lors de tournées sold-out, quoi qu’il arrive. Et surtout,
Kiss s’était persuadé que son public actuel n’était intéressé que par les grands classiques et le Barnum des tournées « nostalgiques », et que le risque d’un échec commercial était trop grand. Surtout après l’énorme succès de
Psycho Circus en 1998, album de la reformation du groupe originel, écrasant tous les albums sortis après
Love Gun (1977).
C’était sans compter sur l’attente énorme des fans de longue date et de la propre envie du groupe de malgré tout continuer à avancer, à créer. Déjà, en 2008, un premier accroc à ce serment, avec la sortie quasi confidentielle de Jigoku-Retsuden(que nous retrouvons ici en CD Bonus), réenregistrement de 15 standards
Kisséens, sur un petit label Japonais, et distribué uniquement pour le marché Nippon, par le line-up actuel.
Line-up, fixe depuis 5 ans, mais que la frange dure des fans old school ne considère toujours pas légitime. Tommy Thayer n’étant toujours pas accepté comme autre chose que le remplaçant d’
Ace Frehley, et depuis le re-départ définitif du Space
Ace, comme ayant "usurpé" la place de
Bruce Kulick. Dernier guitariste solo de
Kiss, d’avant la reformation, et ayant accompagné et participé au renouveau de
Kiss sur les 3 derniers albums "
Unmasked",
Hot in the Shade, l’excellent
Revenge et le très inspiré Carnival of Souls, et la petite traversée du désert les précédant. Ce, sur une durée de plus de 13 ans, bien que la place lui ait été proposée, Bruce refusant simplement de reprendre le maquillage et, indirectement, profiter de la gloire d’
Ace.
Eric Singer, profitant de la petite légitimité que lui offrent ses déjà 17 années de service au sein du "Hottest Band In The World", mais dont, comme beaucoup de vieux fans, j’ai toujours du mal à accepter qu’il endosse, lui aussi, un costume qui ne lui appartient pas …("moralement", les droits sur les maquillages et "personnages" ayant été cédés par
Ace et
Peter Criss).
Donc, depuis 5 ans sous cette forme,
Kiss n’est plus qu’un groupe live qui se réduit à deux membres,
Gene Simmons et
Paul Stanley, les fondateurs du mythe, pour le backstage, interviews et "représentations", offrant à la finale, au grand
Kiss, un air de groupe "virtuel", un presque tribute-band, errant sans but sur des tournées internationales et sold-out, donnant des concerts grandioses et très efficaces, mais vides de sens, sauf celui du profit, faisant de
Kiss un groupe hyper actif mais stérile. Un groupe avec une fin de carrière discutable et sous certains angles, assez pathétique.
Mais, alors que les dernières affirmations de la fin des nouveaux albums pour
Kiss datent de la fin 2008, après 11 ans d’absence de
Kiss dans les bacs, déboule en ce début octobre 2009 l’album le plus attendu de toute leur histoire. L’album qui dira si
Kiss est toujours
Kiss et si Tommy Thayer et Eric Singer en sont enfin des membres à part entière.
2009,
Kiss nous largue une bombe sonique et ça fait plaisir.
Paul nous parle d’un album dans la lignée de
Rock and Roll Over et
Love Gun,
Gene, avec sa célèbre finesse verbale, nous promet le meilleur album de
Kiss depuis 30 ans, faisant ainsi passer à la trappe quelques-uns des monuments
Kisséens, et toute la période "
Unmasked" pré-reformation, l’un n’ayant pas tout à fait raison, l’autre pas tout à fait tort, mais tous les deux affirment l’envie de faire du grand, du fort, du bon
Kiss mais surtout, l’envie.
Autant vous dire que personnellement, j’attendais de pied ferme que cet album voit enfin le jour.
Et pas forcement de la façon la plus positive, craignant déjà qu’il ne le voit jamais et ensuite que
Kiss ne nous serve qu’une resucée des albums sus-cités pour satisfaire sans désappointer la
Kiss Army.
Mais je n’avais pas pris en compte que
Kiss, le groupe, ait à ce point l’envie. Une envie qui s’entend :
Kiss vit toujours et il est en pleine forme.
Et qui le prouve d’entrée avec le titre d’ouverture "
Modern Day Delilah", un titre forcement hyper
Kisséen car signé
Paul Stanley ; les premiers accords du riff qui claquent, vous plaquent, mais que nous sommes loin des "RaRO" et "
Love Gun". Si on devait aller chercher les références, je dirais plutôt
Revenge, mais qu’importe, ça pulse, c’est chaloupé, Heavy, Paul et
Gene (en arrière-plan) sont énormes … quelle pêche ! Avec
Gene Simmons, qui enchaîne avec sa "Russian
Roulette" là, nous nous retrouvons plutôt dans le
Gene de ses albums solo, festif, roublard et entraînant, un titre qui me rappelle son "Tunnel of Love", un gospel speedé et ébouriffant, sa voix est un régal. Tommy Thayer l’accompagnant de son premier vrai solo 100% personnel, plus que sur le précédent titre où il était plus dans la tradition Frehleysiénne. "
Never Enough", non !
Kiss nous offre bien un vrai nouvel album, ce titre aux accents très pop et entraînant serait, si on cherche les références passéistes, à rapprocher là aussi de ce que Paul offre plutôt en solo ou dans la période «
Unmasked » mais assurément, c’est du
Kiss. Un titre festif, qui aurait sa place en live, rien que pour voir Paul se trémousser sur ce groove dansant et frais.
"Yes I Know (Nobody's Perfect)",
Gene dans un style "
Christine Sixteen", voire, comme me l’a fait remarquer mon fils, "Plaster Caster", un Rock
And Roll qui balance et accrocheur, mais un peu trop attendu de la part de notre démon. Un bon titre faisant malgré tout un peu daté, mais atteignant son but, faire plaisir en remuant les souvenirs. La seule référence "claire" à
Love Gun.
Une chose est sûre, pas de fléchissement, jusque-là que du bon, voire du très bon. Mais
Kiss n’avait pas le choix. Et avec « Stand », nous atteignons l’excellence, le titre le plus travaillé. Sur ce duo de chant et d’écriture, la patte de
Gene est dominante, une finesse de chant et mélodique de son meilleur tonneau ; vocalement,
Gene et Paul sont véritablement au top tout au long de cet opus, pas de demi-mesure. Un titre joyeux, positif, pas un hymne mais une envolée de légèreté, avec un refrain beau comme une chanson humanitaire. Bon Dieu, … que ce titre est beau.
Encore extatique après ce feu d’artifices de bons sentiments,
Gene nous colle un coup de platform boots dans les gencives avec "Hot and
Cold", un
Hard Rock bien racé, dans la lignée d’un "Love'Em and Leave'Em", avec un bon solo de Tommy Thayer, dans la tradition d’un
Ace, efficace mais discret et moins fougueux. Avec "All for the
Glory",
Gene et Paul offre à Eric Singer le titre le plus atypique de cet album, un titre garage avec des chœurs scandés, limite "punky", un titre écrit pour la voix éraillée d’Eric qui, étrangement, ressemble beaucoup à celle de
Peter Criss, déjà entendu sur "Black Diamond" et "Comin’
Home" avec cette fois-ci, un très bon solo de Tommy, toujours très empreint de son idole, un ovni
Kisséen, comme ceux que chantait Peter, de très bonne facture mais sans la qualité d’interprétation.
Pour «
Danger Us », c’est encore mon gamin qui m’a redonné le titre que ce
Riff me rappelait tant, « Take Me », (sur
Rock and Roll Over) qui sert de base à ce titre … Un peu faiblard, un peu monotone, qui ne décolle pas vraiment, la seule vraie déception de
Sonic Boom. "I'm an Animal" est un Heavy aux sonorités et au tempo à la Led Zepp, sur lequel est posé un flow limite toasté d’un
Gene envoûtant, une planerie sombre, écrasante, enjolivée d’une envolée de guitare toujours très marquée mais plaisante.
Et là … instant crucial … première mondiale, une nouvelle voix au sein de
Kiss, celle de Tommy Thayer , qui est également l’auteur de la musique (Paul des paroles), simple fan ayant réussi à intégrer l’équipe entourant
Kiss bien avant d’y jouer de la guitare, remplaçant d’
Ace Frehley un peu dans l’urgence, après le refus d’
Ace de résigner pour un tour, et celui de
Bruce Kulick d’endosser la peau d’
Ace. Autant dire que j’ai les oreilles grandes ouvertes et une montée de fiel bien acide en réserve … vais l’soigner … l’usurpateur.
"When
Lightning Strikes" est le titre d’un fan de
Kiss et d’
Ace Frehley qui écrit un morceau pour ses idoles. Un titre d’emblée très
Kiss, très
Ace, un riff accrocheur, un chant pas si mauvais que ça avec des intonations pouvant rappeler vaguement
Ace, un vraiment bon solo, un dynamisme indéniable.
Pas transcendant, mais ne faisant pas tache, un peu cliché, mais pas caricatural.
Et pour finir, "
Say Yeah !", un Folk Rock mélancolique mais poussant vers la lumière, une petite ritournelle de guitares, charmante, un Paul tout en finesse et en émotion, un joli petit pont avant l’explosion de lumières positives qui conclue ce 20ème album studio de
Kiss*
Oui, effectivement,
Sonic Boom nous rattache avec le passé mais sans vraiment faire une fixette. Oui, sur 2 ou 3 titres, les références sont volontairement marquées ; non, ce n’est pas de la revisite facile et primaire,
Gene et Paul se sont impliqués à 100 %, les objectifs sont pour ma part atteints.
Kiss nous sort après 11 ans un nouvel album qui tient la route, qui ne fait pas table rase de la longue et belle période démaquillée et ne caricature pas ses racines qui sont ici "retranscrites" avec 30 ans d’expérience en plus. Bien sûr, il est clair que
Sonic Boom à une orientation "70s".
Mais hormis "Yes I Know (Nobody's Perfect)" et «
Danger Us », les liens du passé se limitent à une petite descente de manche ici, un plan de basse là, un "Oo Yeah !?" de
Gene ou un "Yeah Yeah !!" de Paul ; mais surtout, par le son des guitares, nature, sans effet, comme à l’époque, avec une production de
Paul Stanley parfaitement dosée entre l’actuel de la basse et de la batterie et le vintage des guitares.
Un album qui nous fait découvrir Tommy Thayer en tant que chanteur (il avait déjà co-écrit un titre sur "Carnival of Souls") et normalement en guitariste. Un chanteur, pas de niveau extraordinaire, mais convaincant et agréable, un timbre là aussi étrangement entre
Ace Frehley et
Gene Simmons, mais moins caractérisé et sans l’étendue de celle de
Gene. Niveau guitare, son jeu est très marqué par l’influence d’
Ace Frehley, les solos sont bien adaptés, il y a une inspiration certaine, mais le niveau … ou le feeling n’y est pas … ou les deux, mais, bien que se lançant dans des envolées, Tommy a une des qualités premières recherchées par les boss depuis Vinnie Vincent : la discrétion (il ne restera à jamais qu’un employé). Qualité que possède également Eric Singer qui assure son job parfaitement, par un jeu classieux, moins technique que celui de Peter, moins pêchu que celui d’
Eric Carr, mais donnant une actualité au son
Kiss.
Un album qui ne devrait pas rebuter la frange dure, sans refroidir les nouveaux fans, et pourquoi pas en apporter une nouvelle vague, peut être attirée par la pochette aux couleurs criardes et le graphisme très efficace, du au graphiste qui avait réalisé celle de
Rock and Roll Over.
Un album que je trouve personnellement excellent, à une exception près (
Danger Us), avec plein de bons titres, un son … parfait, un
Kiss en pleine forme. Un album important, qui mérite toute l’attention.
Paul et
Gene se sont surpassés, sûrement par la pression que représente un tel challenge pour eux. A tout point de vue.
Un album difficile à classer, c’est le dernier
Kiss, il n’a rien à voir avec
Psycho Circus, il ne pourrait être le suivant de
Love Gun, et encore moins de
Dynasty, Creatures of the Nigth ou Carnival of Souls …
Un album à part…
Kiss, n’a que ça.
C’est un album de
Kiss, et pis c’est tout !
Et un très bon.
Le meilleur
Kiss du siècle.
Il n'y a plus qu’à espérer que ce ne soit pas le dernier, dernier
Kiss.
Je n’y parierais pas mon T-shirt
Gene Simmons.
fab
Kiss
Merci baucoup pour la chronique. On sent le fan.
J'aime bien ce disque (mis à part le refrain de "Stand" qui ne passe pas du tout) mais je le trouve nettement inférieur au récent "Monster". Qu'en as tu pensé Fab?
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