L'originalité de
Tourniquet, depuis
Stop the Bleeding en 1990, est d'insuffler à son Thrash Heavy Progressif quelques mélodies d'influence classique, le tout avec une technique sans faille, notamment grâce à la virtuosité de son batteur-compositeur Ted Kirkpatrick. Mais au début des années 90, le Thrash
Metal est arrivé à un moment charnière. Avec l'émergence du Death
Metal, la prolifique année 1991 confirmait aussi le passage des grosses pointures du genre à un Heavy
Metal plus conventionnel.
C'est donc dans ce contexte peu propice que sort, en 1992,
Pathogenic Ocular Dissonance, troisième effort des Californiens. Mais dès l'introductif "Impending
Embolism", parfaitement enchaîné au morceau-titre, les bases sont jetées :
Tourniquet n'a rien perdu de ses qualités, et au contraire, va plus loin encore dans l'originalité et se démarque même nettement de ses deux albums précédents.
Plans étranges, changements rythmiques permanents, mélodies et harmonies à la pelle, tel est le contenu de la livraison. Bien difficile de coller une quelconque étiquette à tout cela, même si le Thrash reste le dénominateur commun (appréciez les rythmiques ultra-carrées de "Ruminating Virulence" ou de "Theodicy on
Trial"). Le refrain de "Exoskeletons", évoquant le
Megadeth des dernières années, la rage des écrasants couplets de "Incommensurate" et du hardcoreux "En Hakkore", la structure progressive de "The Skeezix Dilemma", l'étrangeté glaciale de "Gelatinous Tubercles of
Purulent Ossification" (sic !), le speed côtoyant le groove ("Phantom
Limb", "Descent into the Maelstrom") … Bref, la liberté et la facilité apparentes avec lesquelles
Tourniquet développe sa musique, prouvent une fois de plus que le Thrash
Metal ne se limite pas à la rapidité d'exécution ou à un certain formatage. Autre originalité : les titres aux noms étranges, utilisant la plupart du temps des termes médicaux, et les paroles traitant de spiritualité, entourent les morceaux d'une aura obscure particulière (l'intro bizarre de "The Skeezix Dilemma" et son air de manège de fête foraine, les différents bruitages ou autre utilisation de vocoder). A noter aussi que quatre des cinq membres participent au chant et que Guy Ritter (lead vocals) a abandonné ici le chant parfois irritant à la
King Diamond présent sur certains morceaux des deux premiers albums.
Bien que fourni en plans rapides voire blastés (le refrain de "
Pathogenic Ocular Dissonance" ou encore la dernière partie de "Incommensurate"), ce que l'on retient au final de l'album n'est pas sa vitesse, mais bien sa richesse mélodique et rythmique (difficile de citer un morceau en particulier, tous incluant une diversité énorme dans leur structure). Et même si cela semble commun à signaler, de multiples écoutes seront nécessaires à l'assimilation de l'album, chaque passage sur la platine étant source de nouvelles découvertes.
Pathogenic Ocular Dissonance possède son propre style et représente à mon avis la première pierre angulaire du triptyque qu'il forme avec
Microscopic View of a Telescopic Realm (2000) et
Where Moth and Rust Destroy (2003). Quoi qu'il en soit, je peux assurer aux plus aventureux et à ceux qui connaissent les albums sus-cités que la découverte de cet album ne les décevra pas. Indispensable.
ça fait bien plaisir de le voir chroniqué.
c'est un groupe original mais tres heavy
Merci metalmat66 pour ces chroniques passionnées, je vais tenter le coup avec ce disque dont les extraits m'ont bien causés, on verra s'il s'agit d'une porte d'entrée judicieuse pour découvrir l'univers de ce groupe singulier. Commande en cours, du coup.
Une fois l'achat rentré et écouté (une seule fois, mais ça suffit pour ce que je vais écrire), ce qui est sûr, c'est que ça ne ressemble à aucun autre groupe (en tout cas que je connaisse). Quel bagage, ces mecs ! Techniquement, c'est de la haute voltige, et musicalement, ça se lit facilement, enfin, assez facilement, grâce à pleins de plans judicieux, simples en apparence et qui s'enchaînent naturellement, du moins ça se ressent comme ça. Je crois que, une fois bien poncé celui-ci, je vais continuer chronologiquement à creuser d'autres albums. Merci encore, j'aime beaucoup.
Cet album au lexique anatomique est en réalité la meilleure digestion de la décennie passée qui venait de former le thrash, le doom, et le power metal (1982-1992). On y retrouve du Anthrax, du Metallica, du Mercyful Fate, du Trouble, du Metal Chrurch, du Primus... C'est aussi la négation du ronronnement de la NWOBHM et la porte ouverte au nu metal.
Impression similaire : Anacrusis
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