Il fallait bien que ça arrive un jour …
Et pourtant, qui aurait pu le prédire à la vue ou plutôt à l'écoute d'une carrière entamée sous les meilleurs auspices, culminant sur un "
Stormblåst" de toute beauté, empli de tessitures guitaristiques hypnotiques et d'harmonies pianistiques touchantes baignées d'une aura mystérieuse, à la fois nostalgique et mortuaire, assurément l'une des plus belles réussites en matière de black metal atmosphérique, suivie d'un "
Enthroned Darkness Triumphant" plus véloce, plus rentre-dedans, moins envoutant certes, mais qui a su frapper juste par ses riffs acérés et ses claviers monumentaux, plus symphoniques et grandiloquents que par le passé.
Rien ne laissait alors présager de la catastrophe, et pourtant … une seconde partie de carrière où le clinquant et l'artificiel prirent progressivement le pas sur la sobriété et l'authenticité avait de quoi mettre la puce à l'oreille. Une orientation estompant la flamme du Black
Metal pour jouer de plus en plus à fond la carte du spectaculaire, parfaitement assumée cela dit, ayant trouvé son aboutissement sur un "
Death Cult Armageddon" se posant en véritable blockbuster hollywoodien gorgé de riffs pétaradants propulsés à grands coups d'orchestrations massives, parvenant à compenser une inspiration aussi mince qu'un sandwich SNCF, pour peu que l'on ait envie de mettre le cerveau sur off un moment, bien aidé en cela par son soucis du détail permanent et une recherche effrénée de l'arrangement qui tue. Fort sympathique et distrayant. Seulement voilà, le doute commença à s'insinuer en mon esprit : les norvégiens de DB (Dummy Burger ? … non,
Dimmu Borgir, mon bon monsieur), autrefois si inspirés, devenaient aseptisés.
Dimmu Borgir, le désormais symbole par excellence du BM grande consommation (BM ? … Big Mac ? … non, Black
Metal, mon bon monsieur), référence incontournable d'une génération de trve-evil-méchants ne voyant pas plus loin que les bacs de la Fnac, chantre du surfait et de la musique en polymèr(d)e de synthèse.
Ne pouvant vraisemblablement aller plus loin en termes de débauche symphonique pompeuse, les norvégiens décidèrent alors d'adopter une orientation musicale plus brute, une expression plus spontanée traduite par une production plus roots, c'est du moins ce qu'ils prétendaient. Ils ont voulu changer leurs habitudes … pourquoi pas … au fond, je n'ai rien contre ce principe, bien au contraire, car les habitudes c'est comme les bonnes femmes, il faut savoir en changer de temps en temps.
Mais le problème était ailleurs, et les interrogations fusaient : avaient-ils les moyens de concrétiser leurs velléités ? Les guitaristes Silenoz et Galder, ramollis par des années passées à pondre des riffs et autres leads aussi digestes que des barquettes de frites exhalant l'huile rance, pouvaient-ils supporter à eux seuls toute la charpente en la quasi-absence du claviériste Mustis, excellent arrangeur en son état mais arrivé sur le tard pour les séances de répétitions ? Le départ de Nick Barker et sa frappe de brute parviendrait-il à être compensé par l'embauche de Jan Axel "Playskoolhammer"
Von Blomberg et sa frappe de mouche ?
Bien évidemment, ces questions demeuraient très inquiétantes, et je craignais franchement le résultat, je me disais qu'il fallait bien que ça arrive un jour. Et c'est arrivé … Le malaise, même si peu apparent, était trop profond.
Dimmu Borgir, malade à en crever, tiraillé à s'en tordre, ballonné à en exploser, se retenant jusque-là au nom de la sacrosainte Bienséance, a fini par craquer … et la prophétie se réalisa en ce jour du 27 Avril 2007 :
Dimmu Borgir largua un monumental étron dans un tonnerre de flatulences pestilentielles. Nom de code de la chose : ISD (Immonde Selle Dégoutante ? … non,
In Sorte Diaboli, mon bon monsieur).
Un ISD déboulant à grands renforts de riffs pseudo-black de bouffon échappé du cirque Pinder, de bourrades thrash poids plume et de cavalcades heavy boiteuses, tournant à vide, s'enchaînant interminablement, interchangeables d'un morceau à l'autre, dégoulinant comme une mauvaise diarrhée que nos deux gaillards S&G s'acharnent à mouliner à grands coups de tremolos-branlettes au rythme de plans de batterie aussi plats que la poitrine de
Jane Birkin : rien, absolument rien qui ne justifie de balancer la purée dans son falzar.
Parlons-en justement de cette batterie et du bonhomme aux manettes de la mécanique. Alors, oui,
Hellhammer est doté d'un bon niveau technique et a su en son temps apporter rigueur et précision à un
Mayhem qui en avait fichtrement besoin au vu de ses toutes premières prods. Mais là, ça sent l'usure. Le manque de puissance est flagrant. Et comme si ça ne suffisait pas, l'usage outrancier du trigger, accentuant l'aspect artificiel et aseptisé de l'ensemble, confère aux percussions un apparat de boîte à rythmes aussi stérile qu'un eunuque.
Rien à retenir de côté-là non plus, si ce n'est du mauvais, comme les breaks laborieux de "The
Ancestral Fever" ou le roulement en intro de "
The Chosen Legacy" sonnant comme un gamin passant sa crise de nerfs sur son kit en plastoc
King Jouet : désolant et crispant.
Sans parler des interventions de
Vortex au chant clair, que j'ai failli oublier d'aborder, tant elles m'ont marqué. Aussi déplacées qu'un poil de cul atterrissant dans la soupe, elles se sont retrouvées parachutées là sans trop de raison, certainement pour faire joli ou parce que les fans en réclament. Perdues au beau milieu du massacre, elles n'ont eu d'autre choix que de périr lamentablement, sans pouvoir se défendre. Peuchère…
Un massacre qui n'est cependant pas total, une catastrophe que le claviériste Mustis, tel l'invincible Sangoku surgissant du marasme post-apocalyptique provoqué par l'abominable Freezer, est parvenu à contenir in extremis.
Ses interventions, malheureusement trop sporadiques, parviennent pourtant à redonner vie au revêtement plastique de la carcasse dimmuborgienne, y insufflant un semblant d'élan épique, profilant à elles seules la personnalité de chacun des morceaux de ISD. Le cardiogramme s'emballe enfin au son des arrangements de cordes grandioses de "
The Sacrilegious Scorn", je me sens enfin transporté au son des chœurs de "The
Conspiracy Unfolds".
Mustis, le sauveur, et qui comme à son habitude, excelle dans les parties de piano de virtuose : "The
Sinister Awakening" et "
The Sacrilegious Scorn", certainement le titre le plus potable de l'album avec "The
Fallen Arises" où le maestro nous propose un instrumental symphonico-médiéval dépeignant une ambiance cinématographique convaincante, voire même ponctuellement envoûtante lors de l'intervention des chœurs angéliques.
Mais si par le passé, son rôle de locomotive du TGV
Dimmu Borgir lui permettait de tracter efficacement ses boulets de coéquipiers qui lui servaient de wagon, son positionnement en queue de convoi sur ISD lui coupe toute efficience, le contraignant à commettre quelques fautes de gouts. Forcément, c'est toujours la nullité qui finit par déteindre sur le reste. Je pense aux harmonies bal-musette de "
The Invaluable Darkness" ou aux orchestrations hilarantes de "
The Serpentine Offering" rappelant les plus grands moments de Goldorak contre les Golgoths, quoique la puissance dégagée évoque plutôt l'OVT d'Alcor (vous savez, cette espèce de frisbee jaunâtre qui se fait dézinguer à chaque épisode).
Voilà pour tout ce qui concerne l'aspect purement technique et compositionnel : pas grand-chose à en sauver, et c'est bien triste. Mais ce n'est pas le plus grave, loin de là. Car
Dimmu Borgir a oublié un point essentiel, vital, capital : un album doit être réalisé avec le cœur, les tripes et les couilles. Et cette lacune ne pardonne pas, chaque élément de la Triarchie pointant aux abonnés absents.
Dimmu Borgir veut paraître, mais n'est pas, dans ce ISD où tout n'est qu'esquissé, suggéré, caricaturé. C'est beau la volonté, mais contrairement à ce que prétend le célèbre proverbe, vouloir n'est pas toujours synonyme de pouvoir.
Ils entendent nous faire griller vif dans les flammes des Enfers, malheureusement il y a un con qui leur a coupé le gaz (et oui, c'est la crise pour tout le monde).
Point de fournaise ? Alors pourquoi pas une petite séance de blizzard des terres nordiques. Même en restant attentif, je ne perçois que le léger souffle d'une clim Ecotherm. Raté là aussi.
Dimmu Borgir espère nous transformer en passoire sous une pluie de balles tombant dans un tonnerre de détonations assourdissantes, mais je n'entends que les claquements agaçants du AK Paratrooper Jouéclub de mon gentil petit neveu.
Ils aspirent à invoquer le Grand Cornu rompu à toutes les techniques d'étripage en règle, brûlant de nous assommer d'un coup de boule ravageur, de nous perforer d'un coup de corne magistral, de nous achever dans une ruade implacable. Mais que diable, le rituel aurait-il merdé ?! Pourquoi n'ai-je en face de moi qu'une vulgaire vachette emboulée tout droit sortie des joutes épiques d'Intervilles ?!
Ils se sont escrimés à tourner le mythique Diablesses affamées prises en DADV par une meute de cerbères en rut dans un tonnerre de hurlements de souffrance et de jouissance explosant en geysers d'hémoglobine, de mouille et de foutre incandescents. Mais ça joue Ta mère mugissante en jarretelles se tapant son chihuahua dans un flot de menstruation dégueulaxative.
Bienvenue dans le monde du satanic-porno à deux balles et du plastoc en toc, transpirant jusque dans l'artwork et sa figurine au bâti digne d'un éthiopien crevant de famine et aux airbags gonflés à la silicone. Chapeau à l'auteur de cette merde picturale sensée être inquiétante, mais à défaut de chier dans mon froc, je me pisse de rire.
Et comment ne pas parler du summum de l'artificiel et du superfétatoire, j'ai nommé : le miroir. Cet accessoire livré avec la version limitée de ISD, permettant de lire les paroles imprimées dans le livret et dont des hordes de fans ont chanté les louanges, y trouvant un je-ne-sais-quoi de mystérieux et d'énigmatique. Comment peut-on se laisser berner à ce point ? C'est simple : une version Deluxe, un bon coup de pub, de la poudre de perlimpinpin et vas-y que j't'embrouille … Et ça fonctionne, pour peu qu'on soit un tantinet fragile du cigare … ou aficionado des gadgets offerts avec chaque Picsou Magazine. Navrant.
Et derrière tout ça, il y a un concept parolier, une histoire. Ai-je eu l'envie de m'y plonger ? Non. En ai-je eu la patience ? Non plus. Mais qu'importe, un concept en soi n'a jamais fait un album. Il faut aussi et surtout une base musicale solide et cohérente, et au vu de celle que me démontre ISD, le concept, je m'en fous comme de ma première chaussette.
Alors, oui, je ne m'y suis pas intéressé, oui, je ne suis qu'un Trve du Kvlt de la mort qui n'a rien compris à rien, alors oui, traitez-moi comme tel, oui, chatiez-moi, torturez-moi, éviscérez-moi, oui, faites-moi subir les pires tourments de l'Enfer. Oui, mille fois oui, je ne demande que ça. Offrez-moi tout ce que ce fadasse ISD a été incapable de me faire ressentir.
Un ISD qui montre au grand jour les limites et les carences des créations dimmuborgiennes modernes qui, allégées de leurs atours ultra-symphoniques et de leur toute-puissante superproduction, ne sont plus rien.
Des créations d'un orchestre en jupette que le courageux et talentueux Mustis a tenu à bout de bras, permettant de faire illusion le temps de trois albums. Mais tel Messi paumé au beau milieu d'une équipe de CFA, il n'a pu éternellement faire des miracles, surtout en ne jouant qu'une mi-temps. Allez, Must', là tu t'es bien économisé et le prochain match, tu le joues en entier et à fond. On compte sur toi !
...Et bien moi je l'aime bien, il y a de très bon morceaux. Un bon album de metal extreme un peu marketé... Je pense que le pb vient du fait qu'il faut prendre ce groupe avec du recul, à l'évidence lui m^me ne se prend pas trop au sérieux.
Pour moi, c'est du "Hollywwod Black Metal" !!
... mais ca n'en fait pas forcement de la mauvaise musique, au contraire. Sur ce...
Je crois que tout a été dit, cet album est plat et je suis content de l'avoir revendu. For All Tid est mon premier album de black et même si on s'aperçoit rapidement que c'est un premier jet pour le groupe, il reste largement plus envoutant que ce cd contenant qu'un premier titre bien senti (fallait bien avoir qqch de potable pour le clip aussi).
Bravo encore pour ce style et cette chronique.
Je pense que le chroniqueur est ....sourd, et qu'il n'a jamais ni touché une guitare ni frappé une cymbale, içi la création de l'album, le concept et les soit disant gadget Picsou forment un tout, qu'il faut savoir apprécier à leurs justes valeurs, après plusieurs écoutes attentives et pas machinalement après une demi écoute et un jugement tout sauf objectif! Parfois, Mr les chroniqueurs vous oubliez que la musique est le sentiment d'une émotion, que l'on perçoit ou pas, et pas une analyse calculée et une théorie basée sur l'attente ou l'obligation qu'à un groupe (d'artistes) de créér ce que tout le monde (en tout cas une bonne partie) en attend!
Et l'évolution de DB jusque EONIAN est simplement géniale! Celui qui ne la comprend pas, n'a pas le droit de la critiquer négativement, tout au plus exprimer son mécontentement sur l'attente qu'il en avait, sans plus.
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