Que dire d'un album pour lequel tout a déjà été dit ? D'un album sur lequel le death metal moderne s'est plus ou moins calqué ? D'un album ayant un line-up aussi hallucinant que
Human de Death ?
Replaçons ce disque dans son contexte : 1991, l'apparition de grands groupes tels que
Immolation ou
Suffocation aux USA. Death a sorti deux albums très classiques, puis un troisième laissant entrevoir une forte évolution du groupe, sans toutefois changer radicalement.
Puis est sorti
Human, véritable pavé dans la mare du Death
Metal américain, monument de complexité (pour l'époque) et de précision. Car c'est bien avec cet opus que le groupe entre dans une ère nouvelle, son âge d'or qui ne fera que s'amplifier jusqu'au décès de Chuck Schuldiner en 2001. Finis les riffs classiques et les ambiances sombres, le niveau technique s'envole pour tous les instruments, les structures des morceaux s'alambiquent. Le son est parfaitement maîtrisé, avec des guitares incisives et carrées, une batterie millimétrée et Steve Di Giorgio (cela suffit pour parler de basse non ?). Il est en revanche regrettable que la-dite basse soit un peu engloutie dans le mix, quoique bien audible. Les vocaux, comme toujours dans Death, sont assez particuliers mais ont l'avantage de ne pas déranger l'écoute.
Et quel line-up ... Mi-
Cynic (Paul Masvidal et Sean Reinert), Mi-Dieux (Chuck Schuldiner et Steve Di Giorgio), les musiciens ayant rejoint Death à partir de cet album et jusqu'à la fin du groupe laissant rêveur.
Que dire des morceaux, si ce n'est qu'ils se surpassent tous en qualité (à part peut être Vacant Planets) ? Les riffs excellents s'enchaînent sans accroc et le headbang vient assez naturellement. Les styles des deux guitaristes se complètent à merveille lors des solos, Paul Masvidal ayant un jeu d'une fluidité incroyable, contrairement à Chuck Schuldiner, plus adepte du phrasé à base de bouillie de notes (mais bien quand même !). L'opener, "Flattening of Emotion"s, illustre à merveille cette dualité entre les solistes.
Sean Reinert quant à lui apporte une nouvelle dimension à la batterie dans Death, avec un jeu très carré mais varié, avec des influences jazz perceptibles (batteur de
Cynic oblige). Bien que d'un niveau inférieur à
Gene Hoglan, il enrichit la musique avec une profusion de coups de cymbales bien sentis (l'ouverture de "Secret Face" est assez impressionnante de ce côté...) et de contretemps groovy. Ses accélérations à la double-pédale offrent également une dynamique vraiment entraînante, le break de "Lack of Comprehension" en étant un bon exemple.
On note également la présence d'un morceau purement instrumental, "Cosmic Sea", qui s'il n'est pas de la même trempe que "
Voice of the Soul" sur le dernier album, donne son lot de frissons et d'émotions avec ses arrangements harmoniques bien pensés et ses nappes de synthés discrètes.
Le contenu lyrique quand à lui a complètement changé des thématiques gore des précédents opus, et se révèle être plus orienté sur des considérations politiques ou philosophiques. Ce dernier point montre que Chuck Schuldiner a définitivement tracé un trait sur le passé, et les albums suivants continueront sur cette lancée avec des thématiques de plus en plus personnelles. Mine de rien, ça fait plaisir de lire des paroles qui parlent d'autre choses que de gore, de tripaille, et d'autres joyeusetés insipides (Coucou
Cannibal Corpse !).
C'est donc tout au long de la quarantaine de minutes qui constituent cet album que s'enchaînent des tubes incontestables ("
Suicide Machine", "
Together as One", etc...). Moins freestyle que
Individual Thought Patterns, moins émouvant et personnel que
Symbolic,
Human est sans doute l'album le plus froid et le plus carré de Death. Malgré cela, il marque un véritable renouveau du death metal américain, un nouveau départ pour un groupe légendaire qui n'aura de cesse de se perfectionner au fil des albums suivants jusqu'à sa fin tragique.
Human est donc un album indispensable à tout métalleux qui se respecte, pour son intérêt historique, mais surtout pour la musique d'excellente qualité qu'il contient.
Pour moi l'album initiant la Sainte Trilogie (Human - Individual - Symbolic), qui prouve que l'ami Chuck ne vivait décidemment pas sur la même planète que les autres. Il y développe pleinement son jeu à la fois saccadé et fluide, son amour immodéré pour le Heavy commençant à transparaitre dans ses compositions, apparaissant en filigrane derrière des structures purement death metal. Le résultat est unique, composé de mélodies et de riffs au style inimitable.
Morbid Angel et Suffocation sont certes des maitres dans leur domaines respectifs, mais Schuldiner transcende le genre qu’il a lui-même contribué à définir, à une époque où la plupart des autres groupes tentent simplement de se l'approprier. Lovecraft disait de Shakespeare qu’il alimentait la totalité de l’esprit, là où les autres auteurs n’en alimentaient qu’une partie, et pour moi, c'est ce que fait Chuck avec le Death Metal.
J'écoute très souvent les trois albums mentionnés ci-dessus d'affilé, qui forment pour moi un bloc homogène, véritable monolithe indestructible rassemblant une œuvre magistrale et intemporelle, et représentant la quintessence du genre.
En fait, c'est d'abord l'ex-Evildead Albert Gonzales (que l'on retrouvera chez Noctuary) qui remplace James Murphy sur la tournée américaine avec Dark Angel.Une tournée qui va être raccourcie en raison des tensions entre Chuck Schuldiner et certains membres de Dark Angel, notamment le chanteur Ron Rinehart.Ensuite, sous prétexte de mauvaises conditions d'organisation, Chuck Schuldiner refuse de tourner en Europe et abandonne ses comparses.Or le bassiste Terry Butler et le batteur Bill Andrews, qui ne l'entendent pas ainsi, recrutent Walter Trachsler (guitare) et le roadie Louis Carrisalez (qui n'est autre que le batteur de Devastation) au poste de vocaliste puis décident de partir en Europe.Lors de cette tournée (qui passe par la France) ne seront interprétés que des titres de "Scream Bloody Gore" (1987) et "Leprosy" (1988), les deux premiers albums de Death.Voici la vidéo du concert donné à Paris (Elysée Montmartre) le 2 novembre 1990 par cet inattendu line-up, un document rare :
https://www.youtube.com/watch?v=HOgvUeWCXc0
DEATH est également passé à Lyon sur cette tournée fin 1990, mais je n'y ai malheureusement pas assisté, en ayant toutefois eu préalablement connaissance des déboires du groupe lors de sa traversée de l'Atlantique, ce qui m'avait un peu consolé de mon absence. J'ai pu me rattraper fin 1998 (si ma mémoire est bonne) pour la tournée ayant suivi la sortie du 7ème et dernier album de Chuck pour DEATH. Très bon souvenir. ++ FABIEN.
Il y eut également une date à Toulouse (dans une boîte de nuit - feu l'Apocalypse), en première partie de Kreator. Même si Chuck n'était pas là, les titres étaient interprétés assez scolairement, sans génie mais avec application. A l'heure où Internet n'existait pas, certains ont découvert sur place l'absence du divin chanteur/guitariste, ce qui avait quelque peu plombé l'ambiance lors du concert, de mémoire.
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