Parfois, la simple présence d’une personnalité extérieure devient un atout majeur dans la sphère médiatique pour diffuser un nouveau nom, un produit fraichement créé et encore enrobé de l’aspect juvénile des premières heures. Et tout en sachant que personne ne prononcerait votre nom encore inconnu, le sticker promotionnel apparait plus imposant que jamais, visible et cachant presque la visibilité du réel artiste derrière l’œuvre…n’y a-t-il pas ainsi trois fois plus de chance de retenir l’œil, l’attention et la curiosité du badaud ?
C’est un peu la réflexion que je me suis faite la première fois que j’ai vu ce premier album de
Dwail dans les bacs…même si la pochette des plus étranges (et au bon goût des plus discutables) représentant ces têtes d’éléphants au fond rose, de plus apposées à un nom aussi peu (re)connu que (ironie…) "
Helter Skelter".
« Produit par Logan Mader (ex-
Machine Head)».
Il est certain que se payer les services d’un tel homme ne peut-être qu’une expérience extrêmement positive pour un jeune groupe (producteur du dernier
Gojira, des derniers Wasp et
Soulfly, de
Cavalera Conspiracy,
Devildriver,
Raintime…) et que le nom du monsieur assure déjà une qualité intrinsèque minimum, l’américain n’étant pas du genre à accepter n’importe qui dans son antre.
Dwail s’affiche dans un créneau metalcore dans ce qu’il a de plus varié et de plus intelligent dirons-nous , multipliant les breaks, les passages acoustiques, les intonations screamo et même des instants penchant vers le sludge (très instantanés ceci dit).
Pourtant, paradoxalement (et à cause de ce fichu sticker nous promettant monts et merveilles), la première chose choquant aux oreilles est ce son étouffé et manquant grandement de densité et d’impact. Les guitares ne tranchent pas, la batterie est mécanique et le chant manque singulièrement d’accroche…on pourrait reprocher à Logan ici la même chose que sur le dernier
Raintime ("Psychromatic", en 2010), à savoir un son manquant de puissance brute (même si la direction musicale des italiens collait avec ce nouveau son). Et il est vrai que pour un genre comme celui officié par
Dwail, le manque de puissance est préjudiciable…
"
Helter Skelter" se veut pourtant intéressant sur bien des points, même si on regrettera le manque d’émotion du chant de Yannick Sans, aux vocaux hurlés lassants sur la durée. "An Iron
Hand in a Velvet Glove" trace le sillon musical de l’album, entre riffs lourds et saccadés et leads mélodiques en tapping évoquant le
Gojira de "Global Warming" ou "Oroboros", avec cette même volonté de dissonance malsaine et hypnotique. Le niveau technique est relativement haut et on ne pourra critiquer sur ce premier morceau que la présence d’un chant clair encore peu maitrisé et faux.
Lorsque l’on dit que
Dwail mélange les atmosphères, cela se ressent sur l’intermède "Alpha" à l’ambiance flamenco (qui a parlé d’
Impureza ?) lançant un radical et violent "
Rude Awakening", aux vocaux déchirés mais manquant toujours autant d’impact et d’une certaine crudité, d’un côté sans concession qui ôterait cette vision lisse et policée du chant, aux contours screamo encore immatures (on est loin de la souffrance d’un
My Own Private Alaska sur ce point). Le morceau délivre ensuite une noirceur inattendue sur le break, sale et grésillant, fait de quelques accords malsains et d’une narration angoissante. L’intensité remonte petit à petit…mais n’explose malheureusement jamais réellement, retombant dans le même schéma que les trois premières minutes.
On remarque ici parfaitement la jeunesse du combo, disposant d’idées à revendre mais ayant encore des difficultés manifestes à les mettre en place les unes avec les autres pour former un ensemble cohérent de riffs et de mélodies. Ce ne sont pourtant pas les guitaristes qui sont en tort, leur niveau étant tout à fait satisfaisant, comme le prouve "
Sleepless Dream" et ses multiples changements de rythme.
Néanmoins, malgré une évidente volonté de varier les atmosphères et de proposer des choses différentes d’un titre à l’autre,
Dwail ne parvient pas à éviter une inévitable monotonie pour un disque pourtant court (trente-huit minutes). Le retour de la guitare acoustique sur "
Omega" ne changera rien à cet état de fait, même si l’intermède se veut une nouvelle fois très réussie, ambiancé et bercé par une ambiance mystérieuse et inquiétante (que l’on aimerait entendre même sur les morceaux metal). "Neither Man or Woman" débutera sur un mantra tibétain sacré et quasi incantatoire ("The Art of
Dying" ?) qui laisse présager le meilleur à l’avenir, sur les idées du combo mais nécessitera également une certaine prise de conscience des multiples influences que peut renvoyer le groupe à travers sa musique, le privant d’une personnalité propre.
Ce dernier morceau, aux riffs d’abord lancinants puis aux accès fiévreux de rage et de haine, dévoile les possibilités futures de
Dwail, qui devra travailler avec acharnement son chant clair encore souvent de trop, et ses structures de compositions manquant de cohérence et de repères.
"
Helter Skelter" est un premier album et cela se sent dans chaque veines et nerfs de ce disque, encore bredouillant et un peu naïf. Mais face à une maitrise technique aussi prononcé, une première porte d’entrée chez les plus grands avec cette production Logan Mader (qui même si elle laisse à désirer, probablement faute de temps, reste un moyen de collaborer avec d’autres grands noms) et cette volonté de marier les styles, il est presque impératif que
Dwail sortira un second album de bien meilleure facture.
Leur destin est entre leurs mains…il ne reste plus qu’à coordonner les différents éléments dans une même direction pour décrocher les étoiles…
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