Pour être tout à fait honnête, imaginer un seul instant qu'un groupe aussi intègre et obstiné que
Majesty puisse dévier, ne serait-ce que d'un iota, de la ligne directrice artistique qu'il s'est imposé, serait de la folie pure. Que faire alors? Continuer de dénoncer avec force le traditionalisme de cette démarche consistant à caler ces pas presque exactement dans ceux de
Virgin Steele, Iron Maiden mais aussi, principalement, dans ceux de
Manowar? ou alors passer outre et reconnaitre que, malgré tout, au-delà de cette évidente évidence d'un intérêt créatif (et j'insiste sur le "créatif" pour bien signifier qu'il s'agit là, uniquement, de jauger de cette importance-là et non pas de préjuger de la qualité, ou de la non qualité, du travail de ce collectif) frôlant le zéro absolu, le quintet nous propose, désormais, des œuvres d'un Heavy
Metal classique plutôt sympathiques? A choisir, je pense que la réponse idéale à cette interrogation se trouve sans doute dans le consensus consistant à faire un peu des deux. Et ce d'autant plus que ce
Hellforces aura quelques belles qualités à nous offrir. Mais aussi quelques beaux défauts.
Commençons donc par évoquer ces éléments de nature à nous réjouir. Parlons donc de ces pistes convaincantes et, par exemple, du vif, et très Américain, Heavy
Metal Desire et du rapide, et plus Européen,
Guardians of the
Dragon Grail, qui même s'ils ne réinventent pas la roue, loin s'en faut, sont vraiment très attachants. Avec ce Like a
Raptor aux rythmes plus posés, on découvre que la formation est plutôt séduisante lorsqu'elle abandonne tout son arsenal fait de "
Metal", "
Dragon" et autres "Steel". De ces chansons aux cadences moins frénétiques plutôt séduisantes, citons Dance with the
Demon aux refrains vraiment intéressants et à la construction convaincante,
Il y a aussi, ici, une volonté certes subtile et discrète mais manifeste tout de même, d'offrir quelques légères nuances à cet opus. Comme par exemple l'ajout de ces voix féminines opératiques qui si, lui non plus, ne sera pas l'idée la plus révolutionnaire qui soit, donnera, à ce disque, et à ce groupe conservatiste, quelques couleurs pastels supplémentaires. Tout comme d'ailleurs ces tentatives de la part de Tarek "MS" Maghary de moduler un peu son chant. C'est le cas sur, par exemple, les couplets de
Freedom Heart où ses prestations nous évoquent, toutes proportions gardées, celles de
Fish (Marillion). Dommage que les chorus niais de ce morceau anéantissent complètement la délicatesse de ce travail.
Hellforces est, lui-aussi, un titre qui essaye de s'inscrire dans cette démarche en nous proposant quelques rares passages, et notamment une entame et des couplets, un peu plus nerveux qu'à l'accoutumé.
Sons of a New Millenium emprunte, quant à lui, quelques éléments à d'autres genres nettement plus mélodiques (Heavy Mélodique,
Power Metal...). Une chanson qu'on ne serait pas vraiment étonné de retrouver sur un disque d'
Hammerfall.
A noter aussi, que, dorénavant, Tarek, maitrise parfaitement sa voix. Ce qui ne fut pas toujours le cas autrefois.
S'agissant des tares de ce manifeste, citons un March of
Victory épico-héroico-fantasy dont les refrains sont juste d'une candeur assez dérangeante. Une douloureuse difformité que l'on retrouve, malheureusement également, sur le fade
Freedom Heart déjà abordé plus haut.
Dans l'ensemble ce
Hellforces est donc un opus très très sympathique qui l'aurait été davantage encore s'il ne s'était pas alourdi de quelques titres vraiment embarrassants. Cependant, pour l'aprrécier pleinement il faudra, bien évidemment, toujours encore, que l'auditeur soit prêt à se satisfaire d'une expression qui reste très, mais alors très, classique.
Bon, pour être honnête, leur prestation m’a paru plutôt risible, avec leurs dégaines de bébés Manowar et leurs chansons aussi chargées en clichés qu’un album de famille. Pour autant, j’ai fini par trouver un certain charme à cette attitude et à ces petits hymnes désuets mais visiblement sincères, portés par la prestance certes balourde mais finalement attendrissante d’enthousiasme de son ventripotent frontman. Signe qui ne trompe pas : mon gamin de dix ans chantait les chœurs en levant le poing, alors qu’il ne les avait jamais entendus auparavant (quand on connaît la propension des enfants à s’emmerder pendant les premières parties, c’était une gageure). De plus, les gars du groupe ont été plutôt cool à la sortie, se prêtant de bonne grâce aux selfies avec les fans au pied du tour-bus (anecdote amusante : on a même dépanné Tarek et deux de ses zicos de trois tickets de métro afin qu’ils puissent aller voir la Tour Eiffel !).
Bref, au terme de cette petite découverte, j’ai finalement commandé deux-trois CD de Majesty, au premier rang desquels ce “Hellforces” qui est le premier à atterrir sur ma platine.
Ouais, bon ben le moins qu’on puisse dire, c’est que ça ne décoiffe pas des masses… Si l’inspiration Manowar/Accept est bien palpable avec force chœurs guerriers, le tout reste la plupart du temps sur un rythme désespérément mid-tempo et mou, sur lesquels des riffs mille fois entendus viennent se plaquer avec l’originalité d’un drapeau rouge dans un défilé CGT. Si Tarek Maghary chante plutôt pas mal, il demeure imperturbablement dans le même registre, que seules quelques trop rares fulgurances “halfordiennes” viennent parfois égailler (à se demander d’ailleurs s’il en est bien l’auteur, tellement ces envolées tranchent avec le reste de son interprétation). Certes, le rythme s’énerve parfois un peu, comme dans ce “Guardians of the Dragon Grail” où l’inspiration sera plutôt à aller chercher du côté d’un Rhapsody, mais franchement, pas de quoi coller Mémé au mur… Une chanteuse fait son apparition sur deux titres, mais son intervention est tellement limitée et anecdotique que son absence n’aurait rien changé au final. Mais le pire reste toutefois les paroles, tellement caricaturales et redondantes que la prochaine fois que vous entendrez du Manowar, vous aurez l’impression que c’est du Brassens en comparaison.
Et pourtant…
Pourtant, avec un minimum d’entêtement et beaucoup d’indulgence, il n’est pas impossible de finir par avoir de la sympathie pour ce disque. Oui, c’est souvent maladroit ; oui, la même chose a déjà été faite des centaines de fois, et souvent en mieux ; oui, Tarek et ses sbires taquinent souvent les frontières du ridicule avec leur attitude, leurs fringues et leurs thèmes… Mais à force, quelques jolies petites mélodies réussissent quand même à se dégager ça et là, et la désarmante sincérité – pour ne pas dire l’innocence – de l’entreprise finit contre toute attente par toucher l’auditeur.
Alors si vous débarquez dans le Power Metal, oubliez Majesty, car il existe mille fois mieux ailleurs et ce n’est certainement pas le groupe que je recommanderais pour s’initier. En revanche, si le style n’a plus aucun secret pour vous et que vos aspirations se limitent désormais à une petite madeleine de Proust rappelant une époque à présent révolue, vous pouvez tenter l’aventure et investir dans ce “Hellforces” au titre plus impressionnant que le contenu. Les Forces de l’Enfer n’y sont pas bien redoutables, mais au moins y sont-elles sympathiques.
Merci pour la kro ! :)
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