Le dernier album du géant de plomb à ne pas avoir droit à sa chronique ici, un fait tristement révélateur. Révélateur certes - l'album n'est pas un chef d'oeuvre en effet - mais tout de même injuste.
Le contexte s'il est connu de presque tous, se doit être rappelé. Depuis sa création en 68, le groupe a essuyé pas mal de déboires : échecs critiques sur leurs premiers chefs d'oeuvres (malgré un énorme succès public), procès de Willie Dixon, quelques problèmes liés à la drogue, au sexe et au roadie en chef violent, mister Cole, ou même à leur manager colossal Peter Grant ... Plant est opéré des cordes vocales après l'enregistrement de
Houses of the Holy, accident de voiture qui manque de les tuer, mort du fils en 77 ... Si la dépression pointait déjà sur le moyen
In Through the Out Door, à la mort de John Henry Bonham le 24-25 septembre
1980 le groupe se sépare rapidement, amputé d'un membre irremplaçable, d'un ami très proche et d'un batteur qui aura marqué l'histoire du rock.
Coda, au titre emprunté au vocabulaire musical, faisant référence aux notes qui concluent un morceau, n'est donc pas un album normal. Les titres sont des chutes de studio, morceaux enregistrés à diverses époques, lors des différents albums, et qui n'ont pas été retenus ensuite.
Passons à la musique donc.
We’re gonna groove ouvre l’album sur un rock énergique et joyeux, le genre de morceau qui file la pêche, qui swingue pas mal même. L’enregistrement sonne relativement « sale » et on trouve pas mal d’overdubs , explications : en fait ce n’est pas une prise de studio, c’est un live trafiqué par Page au mixage.
Live qui date de 1970, concert au
Royal Albert Hall. Les bruits du public sont donc virés. Le morceau est par ailleurs une reprise de Dixon et ouvrait les concerts de l’époque 69-70.
Commence alors l’étrange Poor Tom. Rythme inhabituel pour un morceau du groupe, batterie obsédante, voix caressante et douce. Guitare mélodique, sèche derrière. Cette ambiance vous rappelle quelque chose ? Normal, ce morceau vient des sessions de
Led Zeppelin III . Morceau enregistré au fameux cottage de Bron Yr Aur, il ne fut jamais joué sur scène. Bluette folk-bluesy éminemment sympathique, le morceau est à découvrir.
Le morceau suivant est bien plus connu. Dixon évidemment, mais surtout morceau qui figure sur le premier album. Le blues anthologique d’I can’t quit you Babe est ici proposé dans une version live trafiquée par Page comme pour We’re gonna groove. A noter que la version est bien coupée. Un intérêt relativement faible donc, une fois que l’on possède cette version live dans son intégralité (
How the West Was Won), mais le plaisir reste là. (Surtout la batterie sur la fin). Mais quelque part, c’est traître d’avoir viré les applaudissements du public, parce que ça ne fait pas illusion.
Walter’s walk est un morceau étrange, mix entre composition inédite et chute de studio. L’instrumental date de 72, époque
Houses of the Holy, les voix furent rajoutées en 1982. Le rendu est étrangement « moderne » pour du Led Zep. Une oreille attentive vous fera reconnaître des riffs de Hots on for
Nowhere. Morceau sympathique tout de même, qui aura cependant probablement juré avec les autres de
Houses of the Holy d’après moi, pas vraiment la même ambiance. Le texte, éminemment triste, rappelle le contexte de l’œuvre. Un morceau un peu triste donc.
Ozone baby, plus joyeux, provient lui des sessions d’
In Through the Out Door. Petite histoire d’amour éconduit et de fierté, le texte ne vaut pas le détour comme on pouvait en avoir sur les albums précédents, mais l’instru est sympa. Un léger effet de déjà-vu et de calibrage radio tout de même. La fin du morceau surprend quelque peu par ces effets de voix dans le refrain répété, bonne idée de la composition !
Mais nous voilà arrivés à une des perles de l’album, un très bon morceau digne de figurer sur un best-of. Darlene provient des sessions de
In Through the Out Door, et personnellement je regrette qu’il était délaissé contre un Hot Dog, mais bon … Un morceau bien énergique, avec un riff lancinant et efficace, un solo groovy et une superbe partition de clavier digne des meilleurs tripots de la Nouvelle Orléans. Jonesy n’a pas souvent été exploité pour ses qualités de claviériste, mais quand c’était le cas, on atteignait toujours l’excellence, c’est le cas ici. J’aime particulièrement la fin du morceau, dont l’énergie me renvoie à Boogie with Stu ou la fin de
Ramble On. Bref je retrouve le Led zep des débuts pour un morceau qui pourtant date de la fin.
Autre perle de la galette, l’instrumental Bonzo’s Montreux. Rien que le titre promet déjà un grand moment. Bonzo, surnom de Bonham, donc morceau hommage au batteur, donc solo de batterie. Enregistré à Montreux, lieu apprécié du quatuor. Le titre est excellent, varié, toujours aussi bon et les effets électroniques rajoutés au mixage par Page rendent plutôt bien. Un OVNI dans la discographie, mais un OVNI qui passe très bien et qui rend un bel hommage au musicien.
Wearing and tearing conclut l’album sur une note plus agressive. La guitare se fait lourde, inhabituellement lourde, mais putain qu’est-ce que c’est bon ! L’intro ressemble à du
Aerosmith. La voix, c’est du Plant en forme. Mais l’alternance de bruit et de silence évoque plutôt le punk. Oui, le punk, surprenant non ?
Pas tellement. On est fin seventies, quand la scène punk britannique a envahi les ondes, reléguant les «
Dinosaures » au second plan. Ce morceau des sessions d’
In Through the Out Door se voulait punk pour rivaliser avec les nouveaux arrivants, d’aveu des intéressés. Le résultat est plutôt positif, il aurait sacrément dynamisé l’album pour lequel il a été enregistré d’ailleurs ! Personnellement les riffs des couplets me font penser à
Trust.
L’album se termine ici, mais sur mon édition – un gravé – j’ai quelques autres inédits .
Babe come on home, une reprise de Bett Berns, enregistrée en 68, morceau folkeux fort sympathique. Travelling
Riverside Blues, un des classiques inédits du groupe, reprise de Robert Johnson, une relecture hallucinante et particulièrement appréciable, un live du RAH de
White Summer (= black mountain side version longue), qui montre tout le talent de Page, et enfin une B side de
Led Zeppelin III, Hey Hey what can I do, un morceau pop-rock fort sympathique également.
En somme, ce non-album comme on pourrait l’appeler, quoiqu’inégal, reste très agréable et différent du Zep habituel. Il fut un bon succès commercial à sa sortie, ce qui montre bien que malgré la déferlante punk, le groupe restait dans tous les esprits. Un disque indispensable pour les fans, mais qui n'est pas le meilleur témoin du génie de ce groupe.
Merci au site Pyzeppelin pour les renseignements précieux sur les morceaux.
je me souviens qu'à l'époque, les journalistes musicaux ne faisaient pas trop la fine bouche car il s'agissait à l'époque d'un nouveau disque de Led Zep.
bien évidemment, les 4 premières galettes sont toujours autant "croustillantes"
Bon après y a des pépites dessus faut pas cracher sans écouter, mais c'est pas du niveau des précédents, c'est sûr. Je le préfère quand même à In Through The Out Door.
Quant à TSRTS pareil y a du bon et du mauvais. Perso un Dazed and Confused de 30 minutes c'est pas pour me déplaire :)
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