Repère identificatoire pourtant stable pour leur auditorat, il semble que la conservation d'une seule et même nomination de groupe ne fasse pas partie des prérogatives de certaines formations. Il en est même qui iront jusqu'à rebaptiser leur nom en fonction de l'évolution conférée à leur projet, dont ce duo né préalablement et sur les cendres d'
Angtoria, groupe de metal symphonique suédois originaire de Sundsvall. En effet, entre 2001 et 2004,
Angtoria se nommait déjà
Torn Between
Two Worlds (TBTW), avant de le voir reprendre le flambeau, et ce, jusqu'en 2011 ; s'ensuivit une période de latence longue de plus de neuf ans, jusqu'à ce que deux de ses membres les plus éminents décident d'agréger à nouveau leurs talents sous la bannière TBTW. Si cette inusuelle démarche pourrait dérouter le quidam, nos deux acolytes sont toutefois restés fidèles à leurs fondamentaux stylistiques, non sans y avoir incorporé d'inédites sonorités dans leurs fraîches partitions...
Dans ce dessein, Sarah
Jane Ferridge (dite ''Sarah Jezebel
Deva''), auteure et interprète britannique aux puissantes inflexions (
Sarah Jezebel Deva, ex-
Covenant, ex-membre live de
Cradle Of Filth,
Mortiis,
Nader Sadek et
Therion), et Chris Rehn, compositeur et pluri-instrumentiste aguerri (ex-
Abyssos, ex-
Evergrey, ex-
Insalubrious, ex-Sargoth), nous octroient ici un EP 5 titres modeste de ses 20 minutes dénommé «
As If We Never Existed », qui n'est autre qu'une compilation des 5 singles réalisés par nos deux compères entre 2021 et 2022. Ce faisant, le laconique méfait nous immerge au sein d'un heavy symphonique gothique aux relents opératiques dans le sillage d'
Angtoria,
Xandria,
Therion et assimilés, laissant entrevoir une technicité instrumentale éprouvée et la féconde inspiration mélodique de ses auteurs.
Jouissant, par ailleurs, d'un enregistrement ne souffrant que de bien rares sonorités parasites, d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation, mais aussi d'une belle profondeur de champ acoustique, c'est dire que la production d'ensemble du skeud a fait l'objet d'une attention particulière de la part de nos deux artistes patentés ; une mise en musique quasi optimale, en somme, autorisant de fait le parcours de la galette d'un seul tenant. Cela étant, il ne nous reste plus qu'à lever les amarres et à suivre nos deux capitaines dans leurs pérégrinations...
Comme l'album studio d'
Angtoria, «
God Has a Plan for Us All », nous y avait déjà sensibilisés voilà déjà 16 ans, nos compères auraient cette rare faculté d'accoucher de ces séries d'accords qui, peu ou prou, s'insinuent dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le pavillon pour ne plus en ressortir. Ils le prouvent, tout d'abord, à la lumière de leurs pistes les plus enfiévrées, dont le solaire up tempo heavy symphonique «
The Beauty of Deception » ; une tubesque et ''angtorienne'' plage aux fines nuances mélodiques, voguant sur d'ondoyantes nappes synthétiques et recelant un refrain catchy mis en exergue par les célestes modulations de la sirène. Dans une même énergie, «
Transparent » se pose, lui, tel un frissonnant effort metal symphonique gothique, un brin opératique, à l'infiltrant cheminement d'harmoniques et instillant de saisissantes montées en régime du corps orchestral dans sa trame. Encensé par les chatoyantes patines de la déesse et octroyant d'insoupçonnés changements de tonalité, le vibrant et ''therionien'' manifeste ne se quittera qu'à regret.
La magie n'opérera guère moins à l'aune de leurs plages à la rythmique un brin plus tamisées. Ce qu'atteste, d'une part, «
The Woman That Never Was », mid tempo rock'n'metal mélodico-symphonique aux riffs épais, à mi-chemin entre
Angtoria et un
Xandria de la première période. Glissant le long d'une radieuse rivière mélodique, doté de délicates gammes au piano, et instillé de choeurs samplés opportunément positionnés, venus escorter les pénétrantes oscillations de la diva, le chavirant propos poussera à une remise en selle en bout de course. Dans cette dynamique, on pourra encore se laisser porter par les vibes enchanteresses de «
All Eyes On Me », ''therionien'' low/mid tempo pourvu d'un refrain immersif à souhait qu'encensent les fluides volutes de la princesse, la brutalité de la chute finale n'enlevant en rien l'efficacité de ce hit en puissance.
Comme bien de ses pairs, le duo s'est attelé au redoutable exercice des reprises, non sans une certaine réussite à la clé. Aussi, ne saurait-on éluder la poignante relecture de «
Hello », somptueuse ballade atmosphérique popularisée par la chanteuse pop soul britannique Adele Adkins (dite ''Adele''), extraite de son 3ème album studio « 25 », sorti en 2015. Conservant les arpèges au piano toute comme l'architecture mélodique de l'originale, la reprise laisse néanmoins entrevoir une batterie un poil plus saillante et des riffs ronronnants doublées d'un bref mais grisant solo de guitare. L'audacieuse mouture ''metallisée'' ici dispensée se voit, à son tour, magnifiée par les amples ondulations qu'autorisent le large spectre vocal d'une interprète bien habitée. Et l'émotion requise est bel et bien au rendez-vous de nos attentes. Bref, un regard alternatif loin de manquer de sel pour un titre pop au rayonnement planétaire. Chapeau bas.
Au final, l'inspiré duo anglo-suédois nous plonge au cœur d'un set de compositions à la fois puissant, racé, intimiste et des plus engageants, n'accusant pas l'ombre d'un bémol ou d'une inutile zone de remplissage qui en altérerait l'effet. Si l'ombre d'
Angtoria plane encore sur bon nombre d'arpèges d'accords de la rondelle, certains arrangements permettent toutefois à certaines pistes de s'en affranchir. D'aucuns auraient sans doute espéré des exercices de style plus variés, fresques, instrumentaux et autres duos manquant ici à l'appel. Gageons qu'il s'agit-là d'un prudent redémarrage pour le groupe suite à une longue période de latence. Aussi le modeste effort aurait-il davantage valeur de test auprès de son public que d'une nouvelle pierre ''précieuse'' à ajouter à l'édifice du combo. Album qui, cependant, pourrait bien faire renouer le groupe avec son auditorat, voire l'élargir. Bref, un heureux trait d'union entre passé et présent, comme pour mieux préparer l'avenir...
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