Voici encore un projet de metal noir québécois. Avant toutes choses, je dois dire que
Forteresse ne m'avait pas beaucoup impressionné avec ses deux précédents opus. Effectivement,
Forteresse joue dans un style de black metal ambiant et nationaliste voulant créer avant tout une ambiance lente et répétitive, de quoi laisser place à la mélancolie et la nostalgie du Québec d'autrefois. Cependant, cet effet a malheureusement tendance à se laisser écraser par l'ennui...
Donc, qu'en est-il de ce «
Par Hauts Bois et Vastes Plaines»? Eh bien, il m'a agréablement surpris. Je m’explique...
Premièrement, les ambiances sont beaucoup plus travaillées, contrairement à leurs précédents albums, sur lesquels on avait déjà entendu tout ce qu'ils avaient à nous offrir au bout d'un titre.
Plus précisément sur «Les Hivers de Notre Époque». Donc sur cet album, les claviers sont plus présents et ils occupent une place plus importante, ils sont même au premier plan à vrai dire.
Forteresse utilise souvent le son des «strings», mais par moments le piano comme dans «IV». Créant une nouvelle ambiance, plus propice à la mélancolie et du même coup captant notre attention. Ou encore, le son de la flûte sur le titre magistral «V», le meilleur de leur discographie, à mon humble avis.
Deuxièmement, la longueur des titres est plus que variée: passant de 1:23 à 10:22 minutes. Ce qui laisse présager une certaine variation au fil de l'écoute. Deux des titres sont purement instrumentaux. Deux titres ambiants pour un album de sept pistes seulement, ça fait beaucoup me direz vous. Néanmoins, ces passages ambiants sont des perles rares. On se laisse facilement bercer par la douceur de ces morceaux. Le seul point négatif que je pourrais leur attribuer, c'est que ces pièces sont trop courtes. Nous, auditeurs, en demandons davantage.
Forteresse nous montre aussi des morceaux de plus de dix minutes. Bien que plus aboutis que par le passé, ils ont encore cette fâcheuse tendance à ne pas capter votre attention, à vous perdre. On se lasse encore de certains morceaux trop rapidement. Je pense notamment au titre «III». Et c'est dommage, car je sais qu'ils sont capable de nous offrir des pièces merveilleuses aux ambiances magiques, dont seul
Forteresse a le secret. Ici je pense particulièrement au morceau «VI». Ce titre arrive à vous placer dans un climat de quiétude rare. Malheureusement, il est de bien trop courte durée.
Troisièmement, les textes, quoique incompréhensibles à l'oreille nue, sont d'une réelle sensibilité. Encore une fois, je reproche à leur précédent opus d'avoir sombré dans la facilité en se contentant de reprendre des poèmes - bien qu’ils soient magnifiques soit-dit en passant, écrits par de braves poètes québécois, plus précisément par Émile Nelligan et Albert Lozeau (pour la parenthèse, si vous avez apprécié les poèmes de Nelligan, vous pouvez toujours aller voir
Sui Caedere, un groupe qui a repris ses poèmes pour en faire un album complet). Donc, comme je le disais, les paroles du précédent album sont effectivement magnifiques mais j’aime entendre les textes de Moribond car eux aussi sont de de toute beauté. Moribond n’a rien à envier à ces poètes, lui-même en est un, et un très doué en plus. Rien ne reflète plus ce que l’on a envie d’exprimer que nous même, c’est pour cela que cet album représente le style de
Forteresse. Car ce sont les textes et la musique qui forment une pièce. Par conséquent, cette fois, nous avons droit à un album 100%
Forteresse. Je vous donne un extrait d'un poème, mon favori:
«L'horizon cristallin dévoile avec pudeur
Ses formes voluptueuses et soyeuses
Et d'un éclat glorieux aveuglant
S'étend une incomparable splendeur.»
Pour conclure cette brève chronique,
Forteresse nous montre ici leur meilleur album enregistré. Les ambiances sont plus propices à la nostalgie et moins lassantes. Les titres comportent plus de variations, même si sur ce point, il y a encore quelques améliorations à faire. Donc, avec cet opus,
Forteresse se forge enfin une identité propre. Je vais suivre la progression du groupe avec plus d'intérêt que par le passé.
Je tiens avant tout à te remercier pour tes nombreuses chroniques , si bien écrite, qui sont de vrais délices à lire.
Effectivement, je crois que j'ai commis une généralisation hâtive en disant ce que tu a cité. Ce n'est pas en écoutant «En Quête du Souvenir» que l'on découvre tout ce que cet album est capable de nous offrir. Notamment les pièces instrumentales (oui encore, mais Forteresse arrive a créer cette ambiance si propre a eux) ou bien «Déluge Blanc» par le «feeling si froid et malsain» si glaciale qu'elle crée, comme tu dit.
Pour parler de Neige et Noirceur, leur premier album («L'Abîme des Jours, L'Écume des Nuits»), est une perle. Son introduction ambiante suivit du clavier représente si bien le nom du groupe. Bien qu'en étant répétitive, on ne s'ennuie pas avec cette galette. Cependant, leur reste de leur discographie m'avait plutôt laissé sur ma faim (excepté le sublime split avec Monarque, le malsain). Mais voilà qu'ils ont sorti un album il y a peu («La seigneurie des Loups») que j'ai adoré. J'ai écrit un chronique mais elle n'est pas encore apparu...
J'ai moi aussi trouvé "La Seigneurie" excellent, dans la droite lignée de leur hypnotique EP "Philosophie des Arts Occultes". Il est vrai que le reste des travaux du groupe peut rebuter au premier abord, mais c'est comme avec Paysage d'Hiver, il faut plusieurs écoutes pour en venir à bout. Ou ne pas apprécier du tout. Enfin bref, j'ai hâte de lire ta chro' du dernier N&N, et vu la qualité de celle sur laquelle nous discutons en ce moment, je n'ai aucun doute quant à sa validation prochaine par les hautes sphères du site. ;)
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